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Opération Sagittaire, le COTAM en action

Écrit le 06/05/23, dans Actualités Internationales

RésEvac grand style pour la Brigade Aérienne d’Assaut et de Projection

Lorsque le week-end des 15-16 avril le Soudan sombre dans le chaos, la situation devient rapidement intenable pour les résidents étrangers de Khartoum. Il est alors décidé d’activer un plan d’évacuation de résidents étrangers par des moyens aériens: le lundi 17 avril, les équipages d’alerte sur la base aérienne 123 d’Orléans-Bricy se préparent pour un pré-positionnement à Djibouti.

Tout derniers préparatifs avant le décollage d’un A400M d’alerte, à Orléans

Trois A400M décolleront, dont deux dans la nuit du 18 au 19, avec aux commandes des équipages pleinement qualifiés pour les missions tactiques en environnement terrestre et aérien contesté : navigation nocturne en basse altitude sous JVN, vol en peloton à plusieurs avions et posé d’assaut seront au menu. Les équipages sont issus des ET 1/61 Touraine et 4/61 Béarn, et les A400M emportent dans leurs soutes des militaires des forces conventionnelles et spéciales, du GIGN, ainsi que divers engins motorisés.

La totalité des missions sensibles s’effectue de nuit

Pendant que la faisabilité tactique est examinée à Djibouti, sous l’égide du général commandant les Forces françaises stationnées à Djibouti, des contacts politiques émanant du sommet de l’Etat sont noués avec les parties belligérantes à Khartoum afin d’obtenir des feux verts diplomatiques nécessaires au déclenchement de l’opération. Logiquement, dans Khartoum en guerre, cette opération ne peut avoir lieu que si les deux parties en conflit, les Forces armées soudanaises, loyalistes, et les Forces de Soutien Rapide, en rébellion, donnent leur accord à l’opération d’évacuation de résidents étrangers.

 Le vendredi 21 avril, les équipages de 3 A400M et d’un C-130 sont prêts à exécuter la partie la plus délicate de SAGITTAIRE, à savoir la mise en place de moyens au sol permettant de sécuriser les rotations des avions, et de convoyer par la route les ressortissants étrangers depuis les points de regroupement à Khartoum jusqu’à l’aérodrome militaire de Wadi Seidna, à 20 km au nord de la capitale. En effet, la piste de l’aérodrome de Khartoum est devenue impraticable au fil des jours, même pour des A400M ; de plus, aucune information ne permet de certifier que les servants des batteries anti-aériennes et missiles sol-air sur place ne tenteront pas d’empêcher l’atterrissage des avions militaires français. La base de Wadi Seidna, elle, est sous l’autorité indiscutée des FAS.

L’aérodrome de Wadi Seidna où sera installée la ‘tête de pont’ de Sagittaire

Un dernier voyant se mettra au vert le dimanche 23, lorsque l’Ethiopie autorisera le survol de son territoire, écourtant d’autant le trajet des avions au bénéfice d’une charge offerte plus importante lors de l’insertion du dispositif et des rotations d’évacuation. Entre temps, on apprend que les USA ont procédé à l’extraction de leur personnel diplomatique, directement depuis l’ambassade, une opération à mettre vraisemblablement au crédit des Osprey.

Djibouti : Un A400M roule pour une nouvelle rotation vers Wadi Seidna

 Dans la nuit du 22 au 23 avril, l’opération Sagittaire entre dans sa phase active, le C-130 (forces spéciales) et les trois A400M volant en peloton atterrissent à intervalles très réduits à Wadi Seidna, sous JVN et en mode « posé d’assaut ». Le contrôle et l’équipement du périmètre est réalisé tambour battant, puis les premières rotations routières de civils depuis Khartoum se déroulent dans la nuit sous la protection de militaires et gendarmes spécialisés. Entre temps, les trois A400M ont redécollé vers Djibouti, sans ressortissants, afin de diminuer l’empreinte au sol de l’opération.

Militaires agissant en soutien, dans un C-130

Dans la journée du dimanche 23, plusieurs rotations permettent d’évacuer de nombreux ressortissants étrangers, français bien sûr, mais aussi de nombreuses nationalités, et des blessés, dont un militaire français gravement blessé par balle. Dans la nuit du 23 au 24, les infrastructures légères commencent à être démontées et seront convoyées en sens inverse le lundi 24, avec les ressortissants se présentant dans l’intervalle.

Fin d’un mauvais rêve pour des centaines de civils : la soute sécurisante d’un A400M

Entre temps, des avions cargos de plusieurs pays européens ont profité de la ‘tête de pont’ organisée par les Français pour faire atterrir leurs propres avions : sans coup férir, ce sont un A400M et un C-130 anglais qui atterrissent, suivis d’avions espagnols, allemands, néerlandais, suédois. Côté français, la frégate Lorraine, participe également à Sagittaire, ainsi qu’un C-130J de l’opération Barkhane (escadron Rhin d’Evreux), qui effectue deux rotations entre Wadi Seidna et Djibouti. SAGITTAIRE, une opération délicate, minutieusement préparée, et parfaitement exécutée, à mettre au crédit des forces françaises en général et du ‘COTAM’ en particulier.

Débarquement à Djibouti Ambouli, base essentielle où stationnent en permanence des moyens militaires français

Pour autant, les équipages des A400M et du C-130 ne sont pas longtemps au repos, puisqu’une autre opération du même style, est lancée dans la nuit du 27 au 28, consistant cette fois à évacuer du Darfour le personnel (principalement tchadien) des Nations-Unies, une centaine de personnes. La mission opère cette fois entre l’aérodrome d’Al Facher (Soudan) et N’Djamena.

Début de désengagement pour les militaires déployés à Wadi Seidna

SAGITTAIRE restera sans doute comme un modèle du genre, mettant en exergue l’action combinée de différentes composantes des forces armées, et pour ce qui concerne le transport aérien militaire, celle des C-130 et des A400M. La blessure en opération d’un militaire laisse deviner la dangerosité de l’opération, une dangerosité qu’auront peut-être soupçonnée les plus de 500 civils évacués par voie des airs durant ces deux journées au Soudan.

La capacité de l’A400M à se projeter vite et loin pour effectuer une opération tactique délicate aura particulièrement été mise en valeur lors de l’opération Sagittaire, ainsi que la valeur et le haut niveau de capacités tactiques de ses équipages.

Alexandre et escadrilles.org

Informations complémentaires : site de l’Etat-Major des Armées.