Selon toute vraisemblance, les négociations entre les Etats et industriels français et indiens sont à un stade très avancé pour l’acquisition par l’Inde d’une seconde tranche de Rafale, sans doute 114 avions dans le cadre du programme MRCA (Multi Role Combat Aircraft) de la force aérienne indienne. Dans la foulée des partenariats industriels noués après la commande et la livraison des 36 premiers avions, cette seconde tranche de plus de 100 appareils verrait une co-production significative des Rafale, au delà d’une simple ligne d’assemblage ; on parle entre autres d’une pleine capacité de maintenance de l’avion et de ses systèmes.
Les partenariats signés comprennent aussi une coopération poussée en matière de développement et production d’un turboréacteur conforme à l’état de l’art, les Indiens connaissant quelques difficultés avec le Kaveri, destiné à propulser leur futur biréacteur de combat. Certains savoir-faire maîtrisés par SAFRAN sont cruciaux pour les parties chaudes du futur engin. Les Rafales de la tranche 2 seraient des avions au standard F4, dotés des spécifications indiennes intégrées aux F3R livrés de 2020 à 2022. Ces appareils seront le fer de lance de la force aérienne indienne pour deux décennies au moins.
Si la force aérienne indienne pousse très fort pour cette nouvelle acquisition appréciant oh combien les capacités et la disponibilité des Rafale (obtenue grâce à une clause de ‘performance-based logistics’ garantissant un taux de 70%), il ne faut pas cependant vendre la peau de l’ours. Plusieurs écueils menacent en effet le complexe écheveau bâti depuis plus d’une décennie. En premier lieu, le temps n’est plus où l’on pouvait mégoter sur la qualité des partenariats industriels : future super-puissance mondiale, l’Inde sera extrêmement exigeante sur les retours obtenus pour l’avancement d’une industrie aéronautique qu’elle souhaite voir émerger au premier plan.
Ensuite, les Américains poussent au maximum pour obtenir une grosse part du gâteau indien : désavantagés par leur arrogance impéraliste sur le plan international (les menaces de sanction sur fond de conflit russo-ukrainien ou d’achat de S-400), ils n’en proposent pas moins des aéronefs peu coûteux, s’engageant même sur des transferts de ligne de production (F-16+ ou F-18+). Le F-35A n’est pas dans la balance actuellement, d’ailleurs les Indiens sont méfiants vis-à-vis de ce produit. De toutes façons, l’Inde n’entend plus nouer de partenariat monopolaire comme elle le fit un temps avec l’URSS … et cela concerne toutes ses acquisitions.
Enfin, la fierté de la nation indienne est bien connue, et elle est de plus exacerbée par les tensions agressives exercées par les dictatures dans son voisinage. La moindre petite phrase condescendante prononcée par un responsable français sur les ‘droits de l’homme et des minorités’ dans la très grande démocratie asiatique serait (1) absolument déplacée et (2) mettrait tout simplement par terre toutes les négociations en cours depuis des années. Ce serait dommageable pour les deux pays. Gare aux personnages politiques pédants et impulsifs …
Alexandre et escadrilles.org