Si on demande à madame Tout le Monde « A quoi ça sert l’Armée de l’Air? », elle répondra sans doute « A nous défendre contre les ennemis venus du ciel ». En temps de paix, il n’y a pas d’ennemi, mais il y a des intrus. Et dernièrement, notre force aérienne a eu l’opportunité de communiquer deux fois sur cette mission essentielle de défense, appelée « Permanence Opérationnelle » … Cela peut toujours servir à l’heure où Bercy a saisi son rabot, sachant que les forces armées sont ses cibles favorites.
La première fois, c’était le 27 janvier, un Mirage F-1CR du « Savoie » décolle de Lorient, après que le klaxon ait retenti à 00h28: un simple avion bulgare qui ne répond plus aux interrogations radio. A 01h06, notre liner facétieux est identifié visuellement et escorté, contrôlé. Il sera un peu plus tard accueilli par des collègues de la RAF.
Ce cas de figure était autrefois connu vers la pointe Bretagne: des avions de ligne des pays de l’Est perdaient leurs cartes et devaient être accompagnés sous peine de se tromper d’itinéraire. Du classique, quoi ! Les Mirage F-1CR de Mont-de-Marsan viennent juste de boucler leur ultime PO.
Lundi dernier, autre cas de figure, pour un décollage « live » ce coup-ci, … et encore en pleine nuit: un détournement d’avion de ligne. A 04h10, le CNAO de Mont-Verdun est alerté par son collègue de Torrejon: le Boeing 767 d’Ethiopian Airlines est intercepté par un Mirage 2000 d’alerte d’Orange à 05h12, qui rejoint 2 Eurofighter italiens.
La situation d’urgence se prolonge, et le second Mirage de l’EC 2/5 vient prendre le relais du premier. Le pilote du 2000 escorte le Boeing 767 jusqu’à Genève. Il n’y a pas d’avion d’alerte en Suisse à cette heure-là.
Ce second cas de figure est nettement plus rare, et aussi beaucoup plus lourd de conséquences graves potentielles que le premier, on le sait depuis septembre 2001. Malheureux pays, fût-il neutre, que celui qui ne prend pas les moyens d’assurer la défense de son ciel de manière autonome.
Deux remarques et un conseil: d’abord, on constate que sur ces deux exemples, la défense aérienne intégrée européenne fonctionne. C’est un avantage de l’intégration Otanienne, on ne peut le nier.
Ensuite, on constate que des avions de chasse « rustiques » (on me pardonnera l’adjectif), sont parfaitement adaptés à la mission en temps de paix: nul besoin d’être F3 et multi-cibles, car les avions de ligne perdus ou détournés n’arrivent pas en escadrille – ils peuvent cependant arriver à 30 min d’intervalle. D’autre part, les règles d’engagement en temps de paix imposent la reconnaissance visuelle de l’intrus.
D’où l’utilité des deux escadrons de défense aérienne qu’il nous reste. C’est ce qu’il faut pour assurer quatre PO en France métropolitaine (cela fait 8 avions en alerte). A moins que l’on ne préfère sous-traiter l’interception des intrus sur le flanc sud-est de la France à la Confédération Helvétique …
Le conseil, c’est pour les menuisiers de Bercy: allez donc vous balader dans les ministères, du côté des machines à café, vers 10h00 et 15h00. Il y a sûrement matière à faire de jolis copeaux.
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